Samedi 20 juin
C’est bien la preuve qu’il est possible de rester une semaine à Séoul sans s’ennuyer. Pour ce dernier jour, il reste encore des choses à visiter…
Ma dernière journée séoulite commence tardivement : de violents orages s’abattent sur la ville depuis ce matin, et il est hors de question que je sorte sous ces trombes d’eau.
Finalement, je profite d’une légère accalmie avant midi pour me rentre dans le parc de l’indépendance, qui comprend plusieurs monuments à la gloire de la lutte des Coréens pour leur liberté.
Le premier est la Porte de l’indépendance, officiellement érigée « d’après l’Arc de Triomphe de Paris » mais qui ne lui ressemble absolument pas – sauf à dire que tous les arcs ressemblent à celui de Paris. Elle date de la fin du XIXe siècle et avait pour but d’exalter l’indépendance politique de la Corée face aux puissances étrangères.
Non loin se trouve un monument en hommage aux patriotes qui ont résisté à l’occupant japonais.
Mais le gros morceau du parc est la prison de Sodeamun. Elle a été construite entre 1907-1908 sur ordre des Japonais afin de mater toute résistance à l’occupation. Ici étaient détenus, torturés et exécutés les membres de réseaux indépendantistes ou des intellectuels continuant à promouvoir la culture coréenne.
La prison a ensuite été utilisée sous la dictature militaire, après la libération, pour enfermer les militants pro-démocratie, avant d’être définitivement fermée en 1987.
Le complexe était énorme, mais a en grande partie été détruit après sa fermeture. Ne reste que les bâtiments ayant un caractère historique important, principalement construits dès l’origine de la prison.
La visite commence par le bâtiment principal, où une courte exposition raconte l’histoire de la résistance, puis emmène les visiteurs au sous-sol, où se trouvaient les salles d’interrogatoire de torture.
Puis l’on visite les bâtiments abritant les cellules, un ancien atelier (la prison, qui comptait 3000 prisonniers, servait de camp de travail) et le bâtiment où se déroulaient les exécutions par pendaison.
Au moment de quitter les lieux, je suis interviewé par des étudiants pour une émission de radio. Ils me demande ce que je fais ici, pourquoi je m’intéresse à l’histoire coréenne, si nous avons de tels lieux en France datant de la Seconde guerre mondiale (il y a le camp de concentration de Natzweiler-Struthof, en Alsace) et comment est enseignée l’histoire chez nous. « Ah, ben justement, y’a un débat en ce moment sur les programmes… »
Je me rends ensuite à Insadong, histoire de trouver quelques cartes postales… Il serait temps. J’en profite pour m’arrêter dans le palais Unhyeongung. Il a été construit au XVIIIe siècle par le prince Gojong, qui deviendra plus tard empereur. Plus petit que les palais royaux, il est par contre plus grand que les demeures de nobles et mérite donc le coup d’œil, d’autant que l’entrée est gratuite.
J’avais prévu d’aller cet après-midi au Free Market, un marché qui se tient le samedi près de l’université et où les étudiants vendent leurs créations, des petits plats, etc. Mais la pluie n’a pas cessé depuis l’aube, je pense donc qu’il n’y aura pas grand monde d’assez fou pour l’avoir bravée (à moins que ça soit un marché intérieur, auquel cas j’aurais raté quelque chose – ceci dit, avec l’épidémie, il n’y aurait sans doute pas eu grand monde).
À la place, je vais dans le quartier de Dongdaemun, qui possède un grand nombre de centres commerciaux. Fatigué, mouillé, pas très motivé, je m’y ennuie passablement, j’ai la flemme de descendre jusqu’à Lotte World (un énorme complexe avec hôtel, centre commercial, musée, parc d’attraction…) au sud de la ville et décide donc de me poser dans une échoppe de Dongdaemun avec une bouteille, une galette de riz et mes cartes postales à écrire.
Un peu pompette, je traverse à pied le centre-ville pour rentrer à la maison, pour une dernière soirée avec mes hôtes, du magkoelli, du shoshu et de l’umeshu.
Dimanche 21 mai
Retour mouvementé à Paris. Ma réservation indiquait un décollage de mon avion à 14h05. M’attendant à une petite heure de transport pour rejoindre l’aéroport, je pars à 11h, arrive à 12h20 et voit que mon avion… est prévu à 13h30 ! Putain, ils n’auraient pas pu me prévenir du changement d’horaire ?!
La femme au guichet prend mon passeport, le scanne et me dit « Oh, system error! ». Ça ne m’inquiète pas outre-mesure (elle est ptete sous Windows), mais par contre, je commence à stresser quand cinq minutes plus tard, elle prend des photos de son écran et passe des coups de fil.
Un moyen, d’autres agents arrivent. Ils sont quatre penchés sur l’écran quand j’entends un lâcher, en français : « Merde, qu’est-ce que ça veut dire ? » OK, là je stresse vraiment.
« Votre réservation a été annulée il y a deux jours. Mais rassurez-vous, on va arranger ça », me dit-il. Ah, ça explique pourquoi je n’ai pas été prévenu du changement d’horaire du vol. « Comment ça ? Il n’a pas changé d’horaire. » Ben si, voilà ma réservation. « Vous l’avez faite quand ? En février ? Ce n’est pas possible, ça a ouvert en mars. »
Et pourtant, le document date bien de février. « C’est bizarre », me dit-il. Je ne lui précise pas que j’ai payé 194€ l’aller-retour et qu’effectivement, ça m’avait semblé bizarre aussi 😉
Mais tout ceci n’est pas le problème le plus urgent. Il est 13h, l’embarquement était censé avoir lieu à 12h30, et je n’ai toujours pas de billet. « On va vous faire rentrer sans réservation », me disent mes sauveurs (qui sont maintenant huit autour de l’écran).
Finalement, un billet est imprimé à 13h05. Une hôtesse coréenne me précède et me fait passer en priorité les contrôles de sécurité et d’immigration. Jamais je n’ai traversé un aéroport aussi rapidement. J’embarque finalement, sans avoir pu dépenser mes won au duty-free. Mais le principal est que je serai au bureau demain, n’est-ce pas ? Et ce, sans avoir été contaminé…