Visite de la ville antique de Jerash et du château d’Ajlun (jour 1)

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Les ruines de Jerash, dans le nord du pays, comptent parmi les plus belles et imposantes que le monde antique nous a léguées. Une journée de visite placée sous le signe des vieilles pierres !

Prologue : notre arrivée en Jordanie

25 janvier 2017, 22h. Après cinq heures d’avion depuis Londres, nous atterrissons à l’aéroport Queen Alia d’Amman. Après avoir changé un peu d’argent auprès d’une jolie hôtesse aux yeux bleus, nous passons l’immigration. Titulaires d’un Jordan Pass, nous sommes exemptés de frais de visa. Ça passe donc très vite. Le temps de récupérer nos bagages, la voiture, et nous – moi et deux amis, Steven (dont vous pouvez voir les photos ici) et Matthieu – voilà en route vers Madaba. Cette petite ville située au sud d’Amman est un point de chute plus pratique, car elle évite d’avoir à entrer dans Amman, ce qui est une véritable épreuve…

Visite des ruines de Jerash

Dès le lendemain, direction Jerash, à une centaine de kilomètres au nord de Mabada. Je découvre avec horreur la conduite jordanienne, qui est particulièrement sportive. Les Jordaniens n’ont que faire du code de la route (je les soupçonne de ne pas passer de permis de conduire), ne connaissent ni le clignotant, ni le fonctionnement des phares, n’ont aucune idée de l’utilité des files de circulation sur la route et des lignes blanches (s’il y a un espace, ils s’y engouffrent : il peut y avoir 4 voitures côte à côte sur une route normale). Honnêtement, je ne sais pas comment j’ai réussi à ne pas emboutir une autre voiture ou me faire prendre en sandwich entre deux camions.

Le trajet vers Jerash, du peu que j’en ai vu (ayant les yeux rivés sur la route) n’est pas très beau. Amman, que nous traversons, et les autres villes du pays apparaissent uniformes, bétonnées, moches. Idem pour Jerash, ville de 120.000 habitants. On se s’attardera pas dans sa partie moderne. Toutes ces villes ont en fait grossi à toute vitesse dans les années 1950 à l’arrivée de réfugiés palestiniens, qui représentent aujourd’hui un tiers de la population.

Y’a quand même des paysages sympa, ne boudons pas notre plaisir :

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A Jerash, nous sommes néanmoins accueillis par une vision de toute beauté : l’arc d’Hadrien. Il fut construit en l’an 129 au sud de la ville antique pour commémorer la visite de l’empereur éponyme (117-138). Cet arc de 25 mètres sur 21 devait devenir l’entrée sud de la ville, mais elle ne s’est jamais développée jusque-là. Du coup, au lieu de trouver derrière des restes de bâtiments, on y voit les ruines d’un hippodrome, qui pouvait accueillir 15.000 spectateurs lors de courses de chars et autres événements sportifs. On se gare non loin et commençons notre visite.

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Fondée selon la légende par Alexandre le Grand au quatrième siècle avant Jésus-Christ, Jerash est un livre d’histoire à ciel ouvert. La ville naquit réellement au deuxième siècle avant Jésus-Christ fut d’abord grecque, au sein de la Décapole (regroupement de dix villes majeures de l’époque), puis nabatéenne quelques années, et romaine à partir de 63 av. J.C. Elle devint siège d’un évêché au quatrième siècle, preuve de son opulence, puis fut tour à tour pillée et victime de tremblements de terre aux septième et huitième siècles. Pour parachever ces calamités, elle fut ensuite le lieu d’un affrontement entre croisés et musulmans au onzième siècle.

Dans sa ruine, Jerash eu une chance : elle fut en grande partie recouverte de sable, ce qui explique sa préservation. Elle a été redécouverte en 1806 et, depuis, les travaux archéologiques n’ont jamais cessé.

Après l’arc d’Hadrien apparaît donc l’hippodrome, puis l’entrée sud de la ville, construite en 130 et flanquée de murailles. La ville comptait quatre entrées de ce genre, mais il n’en reste que deux (celle-ci et une autre au nord).

L'entrée sud, moins imposante que l'arc d'Hadrien.

Quelques pas, on laisse la porte derrière nous, avançons le long d’un mur en pierre de tailles, et restons bouche bée. Devant nous s’étend le plus grand forum de l’empire romain, la place ovale. 90 mètres de long, 80 mètres de large, cette place entourée de 56 colonnes, si elle a perdu les boutiques qui l’entouraient, semble toujours sortir tout droit du passé, tant elle est magnifiquement conservée. Loin sans doute du foisonnement et des discussions qui l’animaient il y a 2000 ans, nous la découvrons dans le plus grand calme, avec très peu de touristes.

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La forme ovale de la place servait à faire le lien entre le cardo maximus (l’axe centrale des villes romaines) et le temple de Zeus.

Construit en 162, ce dernier offre une vue superbe sur le site archéologique. Il impressionne aussi par sa taille gigantesque : le but étant de faire plus grand et plus beau que le temple d’Artémis, que d’autres fidèles construisaient en même temps dans le nord de la ville.

Derrière le temple de Zeus s’élève une autre merveille fantastiquement conservée et restaurée : le théâtre sud. Construit entre 90 et 92 après Jésus-Christ, sous le règne de l’Empereur Domitien, il pouvait accueillir 5000 personnes (3000 aujourd’hui). Des musiciens vous ferons une démonstration de son acoustique contre une obole. Le premier niveau de la scène décorée, qui comportait deux étages à l’origine, a été reconstruit.

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En sortant du théâtre, nous décidons de faire le tour par une petite colline, à l’ouest de la ville, où les excavations n’ont pas encore été entreprises. Seuls quelques vestiges d’églises subsistent. C’est l’occasion non seulement de voir le site dans son ensemble, mais aussi de nous amuser de la présence de biquettes, qui se promènent tranquillement dans les lieux sans se douter que sous leurs sabots reposent deux millénaires d’histoire. C’est quand même simple la vie de biquette.

Nous arrivons ainsi au temple d’Artémis, qui contrairement à celui de Zeus, n’a jamais été terminé – c’est donc une victoire par KO des fidèles de Zeus, qui à la base ont construit leur temple juste pour le plaisir d’en faire un plus grand que celui des fans d’Artémis. Seules douze colonnes de marbre rose ont été élevées sur les 36 prévues. Dommage. Mais ça reste très impressionnant !

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Le théâtre nord, non loin, est plus petit que celui du sud. Il date de 165. Initialement, il comportait que 14 rangées de sièges et servait pour des spectacles ou des réunions du conseil de la ville. En l’an 235, sa taille fut doublée pour atteindre sa capacité actuelle de 1.600 spectateurs. Malheureusement, il fut en partie démantelé au cinquième siècle et utilisé comme carrière de pierres pour construire d’autres bâtiments.

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Cela fait déjà deux heures que nous flânons entre les ruines, et nous n’avons pas encore attaqué le cardo maximus. Long de 800 mètres, flanquée de 200 colonnes en marbre d’Assouan, cet axe dessert les plus beaux monuments de la ville.

La porte nord, le superbe tétrapyle nord (qui marquait un croisement), la nymphée, deux anciens bains publics non encore fouillés… On ne sait plus où donner de la tête. Et la claque est à la fois esthétique et émotionnelle : les traces de char sur les pavés, les marques de couteau sur l’étal d’un boucher nous ramènent dans le passé, donnent de la vie à ces ruines.

Ayant déjà eu l’occasion de visiter pas mal de sites archéologiques, je peux d’ailleurs dire que c’est une des particularités de celui-ci : il est si bien conservé que l’on peut assez facilement s’imaginer la vie et la grandeur de la ville à l’époque. C’est bien plus concret qu’un simple champ de cailloux (sans vouloir offenser le forum romain, à Rome). Autre particularité de Jérash, que me fait fort justement remarquer Steven : on y retrouve au même endroit un grand nombre de styles architecturaux antiques, ce qui est finalement assez rare.

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Le macellum, petit marché orné d’une fontaine, donne presque envie de s’y asseoir. Quel plaisir on aurait eu à y flâner à l’époque… Quoique… Dans les ruines de la cathédrale attenante, une inscription indique qu’elle a été bâtie sur un site où étaient réalisés des sacrifices, ce qui créait une odeur pestilentielle. Au temps pour la flânerie.

La perspective du

La perspective du Cardo maximum (photo de Steven).

La visite s’achève, et l’heure avançant (cela fait quasiment quatre heures que nous sommes à Jerash), nous ne traînons pas et partons directement pour le château d’Ajlun, à une demi-heure de route.

Le château d’Ajlun

Cette visite est une petite déception, car le temps est couvert, avec quelques goutes de pluie. Or, le principal intérêt du château est qu’il est situé sur un promontoire, à 1100 d’altitude, duquel le regard peut, par temps clair, balayer la région, jusqu’à la Syrie, la mer Morte et Israël.

Château Aljun Jordanie

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Faute de panorama, nous devons nous contenter du château. Joli, certes, mais pas franchement exceptionnel. Il a été construit par les Ayyoubides au XIIe siècle et agrandi par les Mamelouks au XIIIe siècle. Il a servi de caserne pendant la période ottomane, mais a été ébranlé par deux séismes majeurs en 1837 et 1927.

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À 16h30, nous repartons vers Madaba – la nuit tombe à 17h et les sites ferment à cette heure-là. Nous y arrivons non sans difficultés (un glissement de terrain a bloqué la route principale, nous obligeant à un détour – puis j’ai pris une mauvaise sortie en plein Amman à l’heure de pointe…) vers 18h30. L’heure de l’apéro, ça tombe bien.

Nous passons la soirée au Haret Djoudnat, réputé être le meilleur restaurant de Madaba. Un peu cher, mais délicieux. Parfait pour bien terminer une journée magnifique. D’autant qu’ils servent de l’alcool, ce qu’on verra peu lors de notre séjour. La Carakale, excellente bière locale issue d’une micro-brasserie fondée en 2009 près d’Amman, restera dans nos mémoires pendant les jours suivants, quand nous devrons nous contenter de thé. Mais ceci est une autre histoire.

Informations pratiques

Jerash :
– Y aller : au départ d’Amman, le trajet dure environ 40 minutes.
– Tarif : 2JD, inclus dans le Jordan Pass
– Horaires : 8h à 18h30 en été ; 8h à 16h en hiver ; 8h à 15h30 pendant le ramadan

Château d’Ajlun :
– Y aller :  30 minutes environ depuis Jerash
– Tarif : 3JD, inclus dans le Jordan Pass
– Horaires : 8h à 18h30 en été ; 8h à 16h en hiver ; 8h à 15h30 pendant le ramadan

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