Lundi 7 octobre
Je vais au lever faire un tour dans le quartier. S’il faisait déjà très chaud hier, c’est pire aujourd’hui, et je ne tarde pas à rentrer à l’ombre. Je n’ose imaginer la chaleur qu’il peut faire ici en été : depuis notre arrivée au Japon, j’ai sorti une fois mon pull, et depuis Kyoto, on commence vraiment à souffrir de la chaleur (note pour plus tard : visiter Okinawa en décembre ou janvier, pas entre mai et novembre).
Après avoir traînassé un peu dans l’auberge , et goûté son fameux « happy pudding », on quitte les lieux pour nous rendre à Miyajima, une île près d’Hiroshima. Notre auberge pour les deux prochaines nuits est juste en face du terminal de ferrys, sur le continent. On peut donc se rendre facilement au centre-ville d’Hiroshima, à 25 minutes de train. Après avoir pris possession de nos lits, c’est ce que nous faisons.
Première ville a avoir été atomisée, en cette funeste nuit du 6 août 1945, Hiroshima est depuis devenue un mémorial grandeur nature contre les dangers de la bombe et pour la paix mondiale.
La ville était devenue, depuis la première guerre sino-japonaise (1894-1895) l’une des principales bases logistiques de l’armée impériale. Durant la seconde guerre mondiale, elle assurait la défense terrestre de tout le sud du Japon et était un centre industriel de première importance, qui produisait notamment du gaz chimique.
Aujourd’hui, la ville compte 1,1 million d’habitant, et a peu de chose à offrir au touriste de passage, en dehors du Parc du Mémorial de la Paix, qui s’étend sur douze hectares et regroupe plusieurs monuments.
Nous arrivons tout d’abord devant le dôme atomique, les ruines les plus proches de l’épicentre de l’explosion. Le bâtiment, qui abritait des bureaux, était situé à 130 mètres de l’épicentre de l’explosion, ce qui l’a en partie protégé (puisqu’il était pour ainsi dire dans « l’oeil du cyclone »). La ville a tout de suite souhaité le conserver en l’état, mais des travaux ont néanmoins au lieu en 1967 et 1989 pour renforcer la structure avec de la résine. Actuellement, le dôme est contrôlé tous les trois ans.
Ces ruines ont été ajoutées en 1996 à la Liste du patrimoine mondial de l’Humanité sous le nom de « Mémorial de la paix d’Hiroshima (Dôme de Genbaku) », avec comme argument que « le Dôme est devenu un monument universel pour l’humanité entière, symbolisant l’espoir d’une paix perpétuelle et l’abolition définitive de toutes les armes nucléaires sur la Terre ». Les Etats-Unis et la Chine s’y sont opposé.
Derrière le dôme s’étant le parc mémorial de la ville, jusqu’au musée de la bombe. Ce dernier a été construit en 1955 par l’architecte Kenzo Tange (qui a aussi réalisé la mairie de Tokyo).
Il se divise en plusieurs séquences. La première partie rappelle l’histoire de la ville et en particulier son rôle militaire important depuis la première guerre sino-japonaise.
Puis, une montre abîmée est mise en avant : elle s’est arrêtée à 8h15, heure de l’explosion. Donnée au musée par un survivant, elle introduit le visiteur dans la partie du musée consacrée à l’explosion. On commence par y apprendre la genèse du projet Manhattan, puis les raisons du bombardement d’Hiroshima. Le but ? Impressionner l’Union soviétique et justifier auprès du contribuable américain les 2 milliards de dollars dépensés dans le projet (sur cette question, je vous invite à lire cet excellent article de Slate, qui explique en détail pourquoi la capitulation japonaise n’est pas due à la bombe atomique).
Des plans et schémas nous montrent aussi l’ampleur de l’explosion (qui a crée une boule de feu de 600 mètres de large, un mini-soleil) et des destructions.
Si l’atmosphère du musée était déjà grave, que dire de la salle suivante, où sont exposés des effets personnels de victimes. Les lambeaux de l’uniforme d’un écolier, qui a réussi à rentrer chez lui après l’explosion et est mort le soir même ; le tricycle d’un bambin, sur lequel il était lorsque la bombe a explosé ; la sandale de bois d’une collégienne, où on distingue la trace noircie de son pied… Seule trace qui ait été retrouvée d’elle.
Au centre de la salle, quelques marches et un mur de pierre. Sur ce mur, une forme noire, la silhouette d’un homme, vaporisé alors qu’il était assis là.
Insoutenable.
Certains lecteurs se diront peut-être : « Ils l’avaient bien cherché, c’est eux qui ont attaqué les Chinois en 1937, puis les Américains en 1941, et ils ont aussi fait pas mal de saloperies pendant la guerre ». Ca ne justifie pas, selon moi, le massacre aveugle de civils (et je pense la même chose du bombardement de Dresde).
Après l’explosion, l’enfer a continué – et continue de nos jours – avec les radiations, qui lorsqu’elles n’ont pas tué en quelques jours, ont semé les graines de cancers et malformations diverses dans les corps des survivants et le ventre des femmes. Le musée revient aussi longuement sur ce point.
La reconstruction de la ville s’est faite très rapidement. Trois jours après l’explosion, alors que Nagasaki connaissait le même sort, le tramway d’Hiroshima reprenait du service. Un demi-siècle plus tard, c’est une ville (presque) semblable à toutes les autres au Japon.
En sortant du musée, nous tombons sur une cérémonie devant le cénotaphe, qui contient le nom de toutes les victimes connues de la bombe. Il s’agit semble-t-il d’un lycée de filles.
Outre le mémorial, il y a plusieurs choses à y voir, notamment le château, reconstruit comme à l’époque, et un jardin japonais classique. Mais faute de temps, nous ne nous y arrêtons pas.
A la place, nous rentrons à Miyajima, et pour une fois, nous couchons assez tôt.
cela reste toujours tres impressionnant de voir les restes de guerre,,surtout les affaires personnelles des victimes,on peut qu imaginer l horreur,quoi qu imaginer est difficile.
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