Elle a son Président, sa Constitution et ses évêques, mais pas d’armée et une fontaine à bière.
Derrière la cathédrale de Vilnius, au-delà de la rivière Vilnelé, le quartier d’Uzupis (nom qui signifie « au-delà de la rivière) a une histoire insolite. Pendant des siècles, ça a été la cour des Miracles, un quartier où personne de sain d’esprit ne serait allé habiter, sauf à ne pas avoir les moyens de faire autrement. Le quartier était tellement mal famé qu’une rue s’appelait « Rue de la Mort ». Ambiance.
Puis un beau jour, la faculté d’art s’étant installé non loin, les étudiants et des artistes ont commencé à investir les lieux, squattant les bâtiments abandonnés et retapant tout ça. Uzupis est rapidement devenu la zone la plus en vogue de la ville, attirant des artistes de partout, puis des gens un peu plus riches. Aujourd’hui, c’est absolument hors de prix ; un exemple parfait de gentrification.
Mais c’est pas ça le plus important.
Un beau jour, deux habitants étaient en train de boire une bière dans un bar du quartier quand ils ont eu l’idée d’en faire une république. L’un des deux s’est autoproclamé président, l’autre a pris le poste de Ministre des Affaires étrangères (la première affaire était d’annoncer la nouvelle aux habitants de Vilnius).
Le Parlement est dans un bar (c’est un Barlement, donc) et on peut y trouver les différents ministres (dont le ministre de la Paix, le pays étant pacifique : il y a d’abord eu une armée, mais ses 12 soldats ont décidé que c’était pas spécialement une bonne idée).
La constitution de la République (rédigée en 3 heures) est affichée en plusieurs langues sur un mur, dont le français (mais pas le breton, donc si y’a des motivés pour traduire… Ils acceptent toutes les langues, faut juste trouver les 200 euros nécessaires pour fabriquer la plaque).
Au centre du quartier trône son « ange gardien », statue dont l’érection a été financée par les habitants.
Cette république n’étant pas très sérieuse, sa fête nationale est le 1er avril. C’est le seul jour où un poste frontière est installé et où il est possible d’avoir un tampon sur son passeport. À cette occasion, la fontaine sur la place principale est alimentée en bière.
Mais Uzupis sait parfois faire autre chose que la fête. Ainsi, pour protester contre l’occupation chinoise du Tibet, ils ont rebaptisé (avec l’accord de la municipalité de Vilnius) une place du quartier « Place des Tibétains ». Ça n’a pas vraiment plu à la Chine, qui a décidé de geler toutes ses importations en provenance de Lituanie, qui se résumaient à des groseilles surgelées.
Autre anecdote : l’un des habitants d’Uzupis n’est autre que l’ancien maire de la ville, qui a mis en place un système de location de vélos. Au début, beaucoup de conducteurs garaient leur voiture sur les pistes cyclables. Le maire a donc décidé de louer un tank pour envoyer un message…
Anne Hidalgo, si tu nous lis, on a le même problème à Paris.