Dimanche 5 mai
J’arrive à Louxor avec 1h40 de retard (la joie du train égyptien : on ne sait pas trop quand il part, encore moins quand il arrive), ce qui me permet de ne pas arriver à mon hôtel trop tôt.
Il s’agit du Boomerang Hotel, situé à 5 minutes de marche de la gare, et dix du temple de Louxor. Il est très bien tenu, vraiment bon marché (10€ la chambre) et propose des excursions à prix raisonnables et clairement indiqués. Bref, une excellente adresse !
La patronne est australienne (mariée à un Égyptien) et a donc un caractère bien trempé : « je ne suis pas comme les femmes arabes qui s’écrasent devant les hommes », m’a-t-elle dit. Elle n’a donc pas hésité à aller menacer d’un bâton les guichetiers de la gare qui essayaient d’arnaquer les clients de son hôtel. Après avoir passé huit mois à rénover (avec style) le bâtiment, en dormant sur un matelas à même le sol, elle a vraiment à cœur la satisfaction de ses hôtes et sa réputation.
Je pars dans l’intention de visiter le temple de Louxor, mais tombe sur la route sur un chauffeur de taxi qui m’a l’air sympa, à qui je négocie une escapade dans la nécropole thébaine pour 100LE. Un coup de bateau et nous voilà sur la rive ouest.
La nécropole thébaine s’étale sur des montagnes désertiques, où la température peut dépasser les 50° en été. Les pharaons du Nouvel empire avaient choisi d’en faire leur dernière demeure, justement parce que l’absence de pluie garantissait en principe l’intégrité des tombeaux pour l’éternité.
La Vallée des Rois est sans doute le plus célèbre des sites de la nécropole (on y trouve aussi la Vallée des Reines, celle des Nobles et le village des Artisans, que je n’aurai a priori pas le temps de visiter). On y trouve des dizaines de tombeaux, plus ou moins en bon état, dont seulement une dizaine est ouvert au public. Le billet d’entrée (80LE) permet d’en visiter 3, et il est possible d’en acheter un supplémentaire pour le tombeau de Ramsès VI (50LE, je prends) et pour celui de Toutankhamon (100LE, aucun intérêt puisque son contenu est au musée du Caire).
Je commence donc par la tombe de Ramses VI, dont la beauté me laisse littéralement sans voix (vous allez me dire : « Ben c’est normal, t’es tout seul ». Vous verrez tout à l’heure que c’est pas si évident). La fraîcheur des couleurs, la clarté des fresques font qu’il est difficile de se dire qu’elles ont des milliers d’années. Surtout que la tombe a été découverte et pillée peu après l’inhumation, et visitée ensuite (des graffitis grecs et romains en attestent).
A côté d’une telle splendeur, le tombeau de Ramsès III me laisse plus de marbre, bien qu’elle présente de belles fresques très bien conservées.
Déception, les tombes que je voulais voir ensuite (car je prépare mes visites) sont fermées : Touthmôsis III et Anémophis II. Je me « rabats » donc sur celle de Mérenptah, dont le sarcophage est toujours là, et entier, et sur celle de Ramsès IV. C’est l’une des plus visitées de la vallée, et ça se comprend : les gravures murales sont d’une précision chirurgicale.
Deuxième étape de la journée, le temple d’Hatchepsout (30LE l’entrée), une femme qui s’est fait passer pour un homme pour devenir pharaon à la place de son gendre. A sa mort, il s’est vengé en martelant toutes le maximum de représentations d’elle qu’il a pu.
Enfoui sous des tonnes de gravats jusqu’au XIXe siècle, ce temple à terrasse a été magnifiquement restauré. Il garde aujourd’hui un côté très moderne dans sa construction.
A noter qu’il n’y a pas beaucoup de touristes sur place, comme d’ailleurs avant dans la vallée des Rois. D’après mon chauffeur, c’est parce que les gros paquebots qui sillonnent le Nil accostent rarement le dimanche à Louxor.
Nous nous arrêtons ensuite pour une bière bien méritée (de la Stella, une bière égyptienne assez légère). Mon chauffeur m’invite à aller voir un gars qui vend des antiquités. « Mais c’est illégal », dis-je. « Mais non, seulement les grosses, pas les petites. » « Il me semble que c’est une question d’âge, pas de taille. » « Bon, laisse tomber. »
Ensuite, nous roulons quelques kilomètres vers le temple Ramsès III, à Medinet Abou. Et là, je ne peux m’empêcher d’échapper un « oh putain ! ». Le temple est réellement très impressionnant, bien conservé (il a été utilisé par les coptes au début de notre ère), avec des immenses pans de murs recouverts de bas-reliefs remarquables. Une visite immanquable !
Celle du Ramesseum, juste après, est un peu moins intéressante. Ce temple funéraire dédié à Ramsès II est très dégradé, il est donc difficile de se faire une idée de son agencement à l’époque où il était debout. On peut néanmoins y voir un buste de 7m de hauteur, et des restes de pieds : ils proviennent d’une statue qui aurait pesé 1000 tonnes, pour 17 mètres de hauteur. La plus grande statue monolithique dont on ait connaissance… Et dont la pierre provient d’Assouan, à 240km de là.
On termine notre tour sur la rive ouest, car je commence un peu à me fatiguer, par les colosses de Nemnon, seul site gratuit du coin. Il s’agit de deux statues de 19,5m de haut, qui siégeaient à l’entrée d’un temple maintenant disparu.
Cette entrée, vous en avez sûrement vu une partie à Paris : c’est de là que provient l’obélisque de la place de la Concorde. Il avait été offert (ainsi que le deuxième, que la France n’a jamais récupéré) par Muhammed Ali à la France, en remerciement pour le déchiffrage des hiéroglyphes par Champollion. La construction du temple a été entamée par Aménophis III, en 1400 avant JC. Il a ensuite été modifié par Ramsès II et Alexandre Le Grand.
Pingback: Jour 9 : Central Park et Metropolitan Museum of Art | Les voyages de Morgan